Tout a commencĂ© il y a quelques annĂ©es avec Second life. Une armĂ©e dâagiles du clavier a convaincu les entreprises que leur salut Ă©tait dans ce monde virtuel.
En prenant pignon sur le Net, il leur suffirait de quelques clics pour trouver de nouveaux clients et faire des affaires mirobolantes. SĂ©duites, les entreprises ont achetĂ© des Ăźles de bits et octets, des constructions en briques Ă©lectroniques, tenu des confĂ©rences ou organisĂ© des recrutements par avatars interposĂ©s…
Les mĂ©dias ont parlĂ© de ces pionniers et se sont lassĂ©s. Les investisseurs ont fait diversion pour quâon oublie que la rentabilitĂ© de lâinvestissement sâest limitĂ©e Ă un peu de mousse.
La page tournĂ©e, les consultants experts es nouvelles technologies et leurs talentueux du clavier sont revenus frapper Ă la porte des DRH et des directeurs de communication. Ils leur ont alors vendu des sites, des rĂ©seaux sociaux, des pages Facebook. Ils ont emballĂ© leur rugissante technologie dans une sĂ©mantique air du temps. Ils leur ont parlĂ© de crowndsourcing, dâopen innovation, de co-crĂ©ation, de sĂ©renpidité⊠ à les entendre, le miracle allait une fois encore ĂȘtre Ă portĂ©e de clic. Leur site dâantan allait devenir des vitrines magiques. Tous les internautes allaient se prĂ©cipiter pour leur proposer des rĂ©flexions subtiles et des idĂ©es innovantes qui leur permettraient de conquĂ©rir le monde. Leur seul souci serait de ne pas se laisser dĂ©border par cette intelligence collective. En interne, les branches, mĂ©tiers, services allaient jacasser gaiement et casser ces cloisons qui freinent lâĂ©mergence de lâinnovation.
Manque de chance, les foules intelligentes nâont pas trouvĂ© le chemin des sites qui sont restĂ©s dĂ©serts. Les collaborateurs ont continuĂ© Ă prĂ©fĂ©rer tailler la bavette Ă la machine Ă cafĂ© du service. RĂ©sultat, aujourdâhui, on parle plus des Ă©checs des rĂ©seaux sociaux que de leurs rĂ©ussites. On se demande mĂȘme sâil en existe !
Pour autant, toutes les entreprises savent que le digital est incontournable. Aucune ne peut se passer de ces outils tant pour travailler et communiquer.
Le dilemme posé, je vous propose quelques pistes pour vous aider à avancer dans la toundra numérique.
Une personne qui n’a jamais commis d’erreurs n’a jamais tentĂ© d’innover. Einstein
Tirer profit de vos Ă©checs et faites Ă©voluer vos outils
Ne vous contentez pas de soupirer en disant : « les réseaux sociaux, on a essayé, cela ne marche pas. » Passez au scanneur chaque dispositif numérique et interrogez tant les utilisateurs que les non-utilisateurs. Comme vous allez trouver des points négatifs à améliorer et des points positifs à développer, vous renoncerez à jeter le tout à la poubelle.
En créant des liens, le tout devient supérieur à la somme des parties
Recruter un responsable de la stratégie numérique
SituĂ© proche de la direction, il aura comme premiĂšre mission dâidentifier et cartographier tous les outils numĂ©riques internes et externes de lâentreprise. Ensuite de mettre en place une stratĂ©gie numĂ©rique qui fait circuler des flux de donnĂ©es et crĂ©e une dynamique dâinformation
A mon Ă©tonnement, cette cartographie globale existe dans peu dâentreprises. La pratique la plus courante est un raisonnement en silo. Chaque branche, service, secteur sâoccupe de sa boĂźte et essaye de la remplir avec les cailloux quâil trouve. Et la quĂȘte est souvent moins riche que celle du petit Poucet !
Et si nous lancions  des missiles de la pensée au-delà des frontiÚres de la raison ? » Stanislaw Jerzy Lec
Casser les frontiĂšres entre lâinterne et lâexterne
Pour monter dans le train des Ă©volutions technologiques, les entreprises se sont mises Ă engager des community manager (ou souvent Ă confier le boulot Ă des stagiaires). Ces professionnels ont alors comme mission dâanimer les comptes Twitter et les pages Facebook de lâentreprise. Pour ce faire, ils partent donc Ă la chasse Ă lâinformation dans lâentreprise. Quand ils ont trouvĂ© de quoi se mettre sur le clavier, il formule des messages inspirĂ©s par les formulaires de sĂ©curitĂ© sociale !
Pour Ă©viter ces boulets informationnels qui encombrent le Net, la seule solution est de faire remonter la diversitĂ© et la richesse des approches dâune entreprise.
Un monde gagné pour la technique est perdu pour la liberté. » Georges Bernanos
Privilégier le contenu
Hier, lors du lancement dâun site ou dâun rĂ©seau social, 80 % du budget Ă©tait consacrĂ© Ă la technique et 20 % au contenu. RĂ©sultat, lâĆuvre numĂ©rique Ă©tait rapidement aussi animĂ©e et sinistre quâune mine dĂ©saffectĂ©e. Cette attention Ă la technique venait de la croyance que si le site fonctionnait, on se dĂ©brouillerait toujours pour lâanimer.
Aujourdâhui, il faut absolument renverser les proportions.
Comment ?
âąÂ   En faisant lâimpasse sur ces cahiers des charges qui prennent 30 % du budget et aboutissent Ă la mise en place de kyrielle de fonctions inutiles.
âąÂ   En utilisant des CMS gratuits en open source (exemples : WordPress, JoomlaâŠ).
âąÂ   En faisant travailler les futurs utilisateurs sur une version brute de dĂ©coffrage installĂ©e en quelques jours.
La technique est moins importante que les hommes. L’important, c’est le projet humain. » Dominique Wolton
Repositionner les rĂ©seaux sociaux au rang dâoutils
Dans la suite logique, il est important de penser en termes d’usage et non dâoutils. Et donc dâarrĂȘter de croire Ă la magie des rĂ©seaux sociaux qui  aboutit trop souvent Ă la crĂ©ation de solublĂšmes (solution qui crĂ©e un problĂšme plus important que celui quâil a cherchĂ© Ă rĂ©soudre).
La technique donne du sens Ă la vie de nombreux techniciens, mais elle leur fait aussi souvent perdre le bon sens.
Engager des Ă©quipes de prestataires mixtes
La technique donne du sens Ă la vie de nombreux techniciens, mais elle leur fait aussi souvent perdre le bon sens. Dâautant plus si ce sont des hommes. Les membres du sexe dit fort sont en effet souvent mus par un hĂ©donisme technologique. Ils apprĂ©cient la technique pour la technique. Si des femmes font partie de lâĂ©quipe, elles mettront dans la cuisine des  « A quoi cela sert ? » qui donnera un autre goĂ»t au potage.
Le gratuit, cela paye
Tester les outils gratuits du Net
Carte heuristique, systĂšme dâĂ©criture collaborative, vidĂ©o-confĂ©rence, confĂ©rence tĂ©lĂ©phonique, dispositif de brainstorming, prĂ©sentations partagĂ©es⊠Le Net regorge dâoutils gratuits extrĂȘmement performants. Testez-les et sâils sâavĂšrent efficaces pour votre communautĂ©, intĂ©grez-les dans vos dispositifs numĂ©riques.
On nâa pas toujours besoin de dĂ©penser des fortunes pour avoir des outils moins performants que ceux qui sont gratuits ou proposĂ©s pour un abonnement modique !
Intégrer des outils facilement appropriables par tous
Et si vous installiez par exemple Yammer, le Twitter interne Ă lâentreprise. Des Ă©changes en 140 caractĂšres Ă©viteraient sans doute moult mails longs comme des jours sans amour. Tant la mise en place que la prise en main sont des jeux dâenfants et cela peut changer totalement les rapports dans lâentreprise.
Repérer les pratiques innovantes et adapter-les
Les SuĂ©dois ont confiĂ© le compte officiel du pays Ă des citoyens. Et si vous faisiez la mĂȘme chose dans lâentreprise en donnant les manettes Ă un salariĂ© (En savoir plus : Des citoyens Ă la barre des tweets nationaux)
Câest une idĂ©e, mais il y en a des centaines dâautres.
Editorialiser vos contenus
La majoritĂ© des contenus sur le Net sont bavards et peu crĂ©atifs. De ce fait, ils ne retiennent que peu lâattention. Chaque rubrique  (texte, vidĂ©o..) doit trouver son originalitĂ©.
La clartĂ© et la rĂ©currence sont au demeurant dâindĂ©niables atouts.
Mais un concept Ă©ditorial percutant ne se trouve pas en un claquement de pensĂ©e. Pour arriver Ă celui de 1001 idĂ©es, il mâa fallu faire un long gymkhana neuronal et mâengager dans des voies sans issue.
(Le principe : prĂ©sentation dâune idĂ©e, on lâinterroge en se demandant si câest ou pas une idĂ©e dĂ©sirable. On essaye ensuite de voir comment on peut sâen inspirer).
Coordonner vos veilles avec des outils attractifs
A lâheure du numĂ©rique, des entreprises performantes pratiquent encore la veille papier. Comme elle ne suffit pas, nombreux salariĂ©s la complĂštent avec des veilles individuelles.
Et pourquoi pas proposer des outils simples et attractifs. Et si vous essayez une veille Ă la mode Pinterest (la nouvelle pin-up des rĂ©seaux sociaux). Vous mettriez des images dans la tĂȘte de vos collaborateurs qui leur permettraient dâĂȘtre rapidement plus crĂ©atifs !
Je le conviens, câest une piste aventureuse que nombreuses entreprises ne se risqueront pas Ă prendre.
Un escalier se balaye par le haut
Former et impliquer le top management
Dans de nombreuses entreprises, les managers rivalisent dâarguments pour justifier leur non-investissement dans les rĂ©seaux sociaux et leur absence de pratique sur le Net. Aujourdâhui pourtant, comme les politiques, il faut quâils sây mettent. Il est impĂ©rieux quâils y posent leur empreinte et quâils ne sous-traitent pas cet aspect essentiel de la communication de lâentreprise. Il nây a pas photo, les stratĂ©gies numĂ©riques gagnantes passent par lâinvestissement des boss.