Demain, nous pratiquerons l’amour collaboratif
Chaque semaine une prévision vous propulse dans le futur
– ChĂ©ri, je tâaime et jâaime Lucie.
– Jâaime aussi aimer et pas possĂ©der lâautre.
– Avec Lucie, ce nâest pas dĂ©finitif.
– Rien ne lâest quand on pratique lâamour collaboratif. On rĂ©invente permanence nos relations amoureuses.
Câest quoi lâamour collaboratif ?
Le travail collaboratif est un mode de travail qui abandonne lâorganisation hiĂ©rarchique pour instaurer une structure de partage et de mise en commun des compĂ©tences.
Sâinspirant du changement de lâorganisation du travail, lâamour collaboratif est une organisation amoureuse basĂ©e le partage et la remise en question permanente et sur la possession et lâexclusivitĂ©.
Ăducation des enfants, entretien de la maison, moyens de subsistance des uns et des autres⊠Lâamour collaboratif nâa rien Ă voir avec partouze ou autres Ă©dulcorants de lâamour. Les partenaires dĂ©finissent des rĂšgles quâils remettent en cause en permanence. Le couple se rĂ©invente en permanence. Il ne fige pas le couple dans un contrat rapidement obsolĂšte
Vous pouvez écouter le podcast pour survoler le sujet en deux minutes ou découvrir les innovations, recherches et les incidences de la prévision sur notre futur quotidien.
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 CâEST DĂJĂ DEMAIN
il faut relancer les dĂ©s, car rien ne va plus du cĂŽtĂ© de lâamour.
Aujourdâhui, câestâŠ
La sobriĂ©tĂ© sur lâoreiller
De nombreuses Ă©tudes montrent quâon assiste au dĂ©clin de lâactivitĂ© sexuelle : un AmĂ©ricain sur quatre affirme prĂ©fĂ©rer regarder Netflix plutĂŽt que de faire lâamour. Plus dâun tiers des Japonais de 16 Ă 19 ans disent ne pas ĂȘtre intĂ©ressĂ©s par la sexualitĂ©. En 2022, lors dâun sondage IFOP, 43 % des jeunes de 15-24 ans ont dĂ©clarĂ© ne pas avoir eu de rapports sexuels durant lâannĂ©e Ă©coulĂ©e.
Un nouveau phĂ©nomĂšne, le «âmasterdatingâ» est apparu sur les rĂ©seaux sociaux et en particulier sur TikTok. Ce nĂ©ologisme vient de «âdatingâ» qui signifie sortir et «âmasturbateâ», se masturber. Le masterdating consiste Ă prendre soin de soi et Ă profiter pleinement de sa propre compagnie.
Ce «âno sexe» pourrait rĂ©sulter dâune exposition trop forte et prĂ©coce Ă la pornographie. LâaccĂšs Ă onze ans ( lâĂąge du premier portable ) Ă cette forme de sexualitĂ© cramerait le dĂ©sir. Elle crĂ©erait aussi une crainte de ne pas ĂȘtre Ă la hauteur.
Le concept du consentement est beaucoup plus prĂ©sent. Craignant que leurs gestes soient mal interprĂ©tĂ©s, de nombreux jeunes renoncent Ă passer Ă lâacte sexuel.
La phobie de lâenfermement
Une étude du CSA consacrée au genre montre que la bisexualité progresse. De plus en plus de jeunes ( et pas mal de moins jeunes ) ne veulent plus avoir à choisir un camp.
Ils refusent les modalités amoureuses binaires qui opposent les hommes aux femmes et les hétéros aux homos. Ils préfÚrent multiplier les possibles que de les diviser en étant enfermés dans une catégorie.
Ni en couple, ni pas en couple
AprĂšs lâamour romantique fusionnel, on passe au modĂšle conjuguant affirmation de soi et sentiment amoureux.
Nombreux jeunes se considĂšrent ni en couple, ni pas en couple. Leur relation nâest pas du sexe sans attachement. Ils partagent des activitĂ©s, ont des amis communs⊠Ils ne se considĂšrent pas pour autant en couple.
Câest une relation intermĂ©diaire oĂč la complicitĂ© et la tendresse sont de mise, mais oĂč il nâest pas question pour autant dâenvisager un avenir Ă deux. On ne se promet rien, car on ne sait pas si, dans un mois, on continuera Ă se voir.
Cet entre-deux permet de garder sa liberté. On évite le définitif du couple qui ferme les portes de possibles. On ne se projette pas ensemble dans un monde qui, avec le réchauffement, a de plus en plus de mal à ressembler au paradis.
Une autre vision du bonheur
Une enquĂȘte menĂ©e par Arte et France Culture montre que le romantisme dâantan subsiste. La vie Ă deux semble toujours une maniĂšre de sâĂ©panouir.
Mais, lâĂ©tude montre que lâon peut aussi ĂȘtre heureux sans relation amoureuse Ă tous les Ăąges de la vie : chez les 18-24 ans (82 %), 25-39 ans (70 %), 39-54 ans (64 %), plus de 55 ans (63 %).
PrivilĂ©gier le bonheur en dehors de la vie Ă deux peut ĂȘtre a consĂ©quence de la multiplication de dĂ©samours brutaux. Alors quâune personne est « raide dingue, accroc, in love, bref, elle kiffe grave, » lâamour fou se termine soudainement dans un silence. Avec ce phĂ©nomĂšne quâon nomme le «âghostingâ», la rupture est sans prĂ©avis. Cette Ă©preuve Ă©branle la conception romantique de lâamour et donne surtout peu envie de sâengager.
De la consommation collaborative Ă lâamour collaboratif
Dans les siĂšcles passĂ©s, le mariage nâĂ©tait pas lâacte privĂ© de deux ĂȘtres Ă©prouvant de lâinclination lâun pour lâautre. Il Ă©tait subordonnĂ© aux stratĂ©gies et aux prĂ©occupations Ă©conomiques des familles, aux impĂ©ratifs de la possession de la terre et de lâargent.
MĂȘme si les mĆurs Ă©voluent, le mariage et la propriĂ©tĂ© continuent Ă faire bon mĂ©nage. Si plus personne nâest propriĂ©taire de personne, la possession se traduit en filigrane dans le langage. On parle de ma femme, mon mari, mes enfants, ma maison⊠Et dans les moeurs cette « propriĂ©té » se traduit un peu trop souvent par de la violence sur lâautre.
Traditionnellement, un couple possÚde des objets ayant de plus en plus de valeur. On a un appartement puis une maison, une voiture de plus en plus confortable, les caisses du début sont remplacées par des meubles Ikea puis des meubles de designers⊠La possession est la marque de la durée du couple.
Avec lâĂ©conomie collaborative, les rapports aux objets Ă©voluent. On privilĂ©gie de plus en plus lâusage sur la propriĂ©tĂ©. Voitures, appartements, outils peuvent ĂȘtre partagĂ©s en quelques clics.. Quel intĂ©rĂȘt dâinvestir dans une villa pour lâutiliser 15 jours par ans, dâune perceuse qui fonctionnera 5 minutes tous les deux ansâ?⊠Quand lâusage devient simple, la propriĂ©tĂ© perd de son intĂ©rĂȘt
Et si cette évolution sociétale contaminait le couple ?
Et si demain, on pratiquait lâamour collaboratif ?
Cela contribuerait Ă redessiner lâamour, le couple, la sociĂ©té⊠.
De lâamour mĂ©lodieux
Avec lâamour, on est capable de dĂ©placer des montagnes. Cet Ă©lan envers les autres est une Ă©nergie qui donne Ă chacun de tout changer.
Le problĂšme est que cette phĂ©nomĂ©nale Ă©nergie tourne rapidement en boucle dans les couples traditionnels. On la canalise en crĂ©ant des habitudes et routines qui finissent par dĂ©caper lâenvie dâen dĂ©coudre avec la vie. Ou on sâen sert pour sâagresser mutuellement. Lâamour collaboratif va permettre de conserver cette Ă©nergie qui sera rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e par les ouvertures permanentes Ă dâautres possibles.
Lâamour sera alors plus mĂ©lodieux. Il deviendra une fugue. On sâaccordera un instant. On profitera de lâharmonie pour sâĂ©panouir avant dâenvisager une autre partition.
Un chaos créatif
La théorie du chaos élaboré en thermodynamique des fluides stipule que : « Un désordre fait naßtre un ordre de qualité supérieure. »
Cette thĂ©orie affirme que le dĂ©sordre est nĂ©cessaire pour innover, car il crĂ©e des espaces de libertĂ© permettant dâenvisager dâautres possibles. A contrario, lâordre coince chaque personne et objet Ă une place et le contraint Ă lâimmobilitĂ©.
Si le couple traditionnel interdit le dĂ©sordre, lâamour collaboratif crĂ©e cet espace de libertĂ© qui va permettre de rĂ©inventer lâamour et plus largement les relations entre humains.
Cette crĂ©ativitĂ© dans lâintime va se diffuser dans les autres sphĂšres de la vie sociale. Elle pourra aider Ă trouver des solutions pour rĂ©soudre les dĂ©fis qui se prĂ©sentent aujourdâhui Ă la sociĂ©tĂ©.
Une ouverture salutaire
Si le couple continue Ă exister, il ne sera plus la norme sociale. On pourra faire Ă©merger ses propres envies en matiĂšre dâamour et non plus se sentir enfermĂ©es dans celles que la sociĂ©tĂ© impose.
La coparentalitĂ© qui dĂ©coulera de lâamour collaboratif Ă©vitera que des sĂ©parations amoureuses continuent Ă mettre des parents et en particulier des femmes dans des situations de prĂ©caritĂ© Ă©conomique et sociale.
Pour demain ou aprĂšs-demain, lâamour collaboratif ?
Cela pourrait ĂȘtre pour demain.
MĂȘme dans un monde minĂ© par lâindividualisme, lâhomme dispose d’une formidable capacitĂ© Ă coopĂ©rer.
Le changement nâest pas trĂšs important. Il faut juste changer le co de conjoint pour le co de communautĂ©.
Ce bain de jouvence social aura bien entendu ses nombreux dĂ©tracteurs. Ils ne lĂ©sineront sur les violences pour montrer que le passĂ© nâest pas si dĂ©passĂ© que cela et que le couple traditionnel ne va pas mourir si vite. On peut juste espĂ©rer que lâon saura assez sâaimer pour rĂ©ussir ensemble Ă dĂ©goupiller leurs bombes avant quâelles nâexplosent.
Comme quand on nomme les choses, elles commencent Ă exister, je propose au Petit Robert dâajouter le mot collamourer ou pratiquer lâamour collaboratif. Si le mot ne vous convient pas, nâhĂ©sitez pas Ă en proposer un autre.
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